Le végétarien, vu du dehors

Je viens de tomber sur cette étude sociologique des végétariens par Yann Plancqueel.
Lire le sommaire, plutôt rapidement, pour un végétarien, c’est assez désagréable. Ca donne le sentiment d’une étude orientée, appuyée sur la sensiblerie des végétariens, leur manque de rationalité. Pour vérifier, j’ai sauté sur la lecture des synthèses finales, et non, ça a l’air totalement neutre, bien que l’auteur soit probablement omnivore. Il n’y a aucun jugement sur les raisons du choix, en bien ou en mal. C’est une étude purement sociale. Je lirai le reste plus tard.

Mais en ce qui concerne la déconnexion implicite entre rationalité et éthique…
Le fait est que les végétariens ne sont que des humains, et pas des êtres de pure raison, donc effectivement, tous les végétariens ne mettent pas comme priorité de justifier leur choix par une grande et belle et cohérente réflexion rationnelle. Comme je l’ai dit plusieurs fois, le végétarisme n’a besoin que d’une raison, et elle saute aux yeux de tous les végétariens.

Quant à la rationalité, il est vrai qu’en soi, ça ne justifie pas l’éthique. On peut décider d’inclure qui on veut dans notre éthique. Notre famille, et/ou nos amis, et/ou les individus de notre sexe, et/ou nos compagnons idéologiques, et/ou nos concitoyens qui partagent la même culture, et/ou tous les individus de notre espèce, et/ou tous les individus doués de sentience, et/ou… personne. (C’est d’ailleurs pourquoi l’éthique varie selon les époques et les sociétés.)

Parce qu’effectivement, la seule personne dont je sois sûr de l’existence, c’est moi-même. La seule personne dont je sois sûr à 100% que nos intérêts soient communs, c’est moi-même. La seule personne dont je sois obligé de tenir compte de l’existence, c’est moi-même. L’altruisme, ça me facilite la vie, ça me permet de prévoir les comportements des autres individus si je me les mettais à dos, et ça me permet de vivre dans une société où chaque individu tient compte des autres, ce qui me permet moi-même de vivre dans une certaine sécurité à l’idée que je ne risque pas ma vie à chaque instant, et un certain confort à l’idée que l’entre-aide pourrait un jour m’être bénéfique. On peut en rester là. Je peux décider que mes faits et gestes ne sont tous motivés que par mes propres intérêts, y compris ceux jugés altruistes ou honorables par les observateurs extérieurs.
Cependant, je peux aussi faire un travail intellectuel d’identification à l’autre, que la société m’a appris et que l’instinct me permet d’intégrer facilement (pour simplifier mes rapports sociaux et ainsi me fournir des outils de survie), et c’est ce qu’on appelle l’empathie. Je peux considérer que l’existence (probable) des autres est une vérité et un absolu en soi, dont je dois tenir compte, et que je n’ai pas à remettre en cause.
En tout cas, si j’applique intuitivement cette empathie aux individus humains, il devient difficilement soutenable intellectuellement de ne pas l’appliquer aux autres animaux neurologiquement proches, à moins d’entretenir soigneusement mes propres incohérences et contradictions (quasi schizophréniques).

Mais dans l’absolu, l’éthique, appliquée à quoi que ce soit, n’est pas rationnelle. Dans l’absolu, si j’étais purement rationnel et si j’avais les moyens d’y survivre et d’y trouver mon intérêt (ce qui est fort probable), je pourrais aussi bien décider d’exterminer toute vie animale (dont humaine) sur Terre.

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